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Histoire de l’Association du pneu et du caoutchouc du Canada

Les années 1920 : l’Association est née

Le 6 janvier 1920, A.L. Viles, directeur général de la Rubber Association of America (RAA) - qui deviendra plus tard la Rubber Manufacturers Association [RMA], aujourd’hui appelée la U.S. Tire Manufacturers Association [USTMA] - accueille dans ses bureaux à New York une délégation de douze fabricants de caoutchouc du Canada. Celle-ci comprend, entre autres, les entreprises Ames Holden Tire Company, Canadian Consolidated Rubber Co., Dunlop Tire & Rubber Goods Co. Ltd., Goodyear Tire & Rubber Company of Canada Ltd., Gutta Percha & Rubber Ltd., Independent Rubber Co., Miner Rubber Company et Partridge Rubber Company.

Au terme d’une discussion portant sur divers sujets chers aux fabricants canadiens ainsi qu’aux membres de la RAA, les délégués présents décident à l’unanimité d’entreprendre des démarches pour former une organisation regroupant les membres de l’industrie du caoutchouc au Canada qui serait affiliée à la Rubber Association of America sous réserve de conditions à déterminer. À cette fin, un comité est nommé pour organiser une rencontre au Canada visant à déterminer les enjeux à aborder et sur lesquels agir. Ce comité est composé des membres suivants :

Messrs. A.D. Thornton Canadian Consolidated Rubber Co.

W.H. Miner Miner Rubber Company

C.N. Candee Gutta Percha & Rubber Ltd.

C.H. Carlisle Goodyear Tire & Rubber Company of Canada Ltd.

L’organisation canadienne est alors considérée comme une section de la RAA. Selon l’entente, A.L. Viles de la RAA doit assister à ladite rencontre tandis qu’A.D. Thornton, en tant que membre de la RAA, s’emploie à recruter d’autres entreprises canadiennes non membres de la RAA pour se joindre à la section canadienne en adhérant au préalable à la RAA.

Le 4 février 1920, un groupe de fabricants canadiens de caoutchouc et A.L. Viles se réunissent à Toronto chez Goodyear Tire & Rubber Company of Canada Ltd en vue de former la section canadienne de la Rubber Association of America Inc. Monsieur C.H. Carlisle est élu par acclamation président du conseil intérimaire.

Lors de cette réunion, A.L. Viles présente le rapport annuel de la RAA ainsi que la nature du travail entrepris par l’organisation, indiquant que les membres payaient une contribution volontaire de trois sous par 100 livres d’achat de caoutchouc brut, exigible mensuellement.

Intersection des rues King et Yonge, vers 1930. Photo prise depuis le toit de l’immeuble de la Royal Bank. (Source photo : Archives de la Ville de Toronto, Fonds 1244, article 10062)

Victor van der Linde de l’entreprise Van der Linde Rubber Co. fait valoir qu’une organisation canadienne distincte doit être constituée pour traiter des problématiques spécifiques aux fabricants canadiens.

Victor van der Linde, de l’entreprise Van der Linde Rubber Co., fait valoir que même s’il considère que la RAA est en mesure de régler un grand nombre d’enjeux d’ordre général, une organisation canadienne distincte demeure, à son avis, nécessaire pour traiter des problèmes spécifiques aux fabricants canadiens, comme le transport et les tarifs douaniers, les défis d’exportation, les relations industrielles et les pratiques commerciales typiquement canadiennes. Au terme d’une discussion, il est convenu que l’organisation canadienne, quel que soit son rapport avec la Rubber Association of America, doit être exploitée en tant qu’association canadienne distincte.

Soumise par C.N. Candee et appuyée par monsieur Van der Linde, une motion est déposée selon laquelle les fabricants canadiens présents à la rencontre se prononcent officiellement en faveur d’une association canadienne; cette motion est adoptée à l’unanimité. Estimant que le groupe souhaite aller de l’avant rapidement, A.D. Thornton soumet ensuite une motion dûment appuyée visant à créer un comité exécutif provisoire composé d’un président du conseil, d’un vice-président et de cinq membres pour se charger du processus de constitution d’une organisation qui s’appellerait The Rubber Association of Canada.

Peu de temps après, le groupe décide de former un comité exécutif temporaire chargé d’élaborer une charte, de recruter un directeur général et de préparer une ébauche de l’acte constitutif et des règlements administratifs.

Le 17 mars 1920, le comité exécutif temporaire reçoit ses lettres patentes de constitution de l’organisation The Rubber Association of Canada.

Le 12 avril 1920, le conseil d’administration provisoire se réunit dans les bureaux de Goodyear à Toronto pour procéder à l’élection des entreprises membres fondatrices :

MEMBRES FONDATEURS :

Ames Holden McCready Tire Company T.H. Rieder

Canadian Consolidated Rubber Co. A.D. Thornton

Dunlop Tire & Rubber Goods Co. J. Western

Firestone Tire & Rubber Co. of Canada R.H. Jeffers

Goodyear Tire & Rubber Company of Canada Ltd. C.H. Carlisle

Gutta Percha & Rubber Ltd. C.N. Candee

Independent Rubber Co. R.F. Foote

K&S Tire Co. J. O’Mara

Kaufman Rubber A.R. Kaufman

Miner Rubber Company W.H. Miner

Northern Rubber Company A.D. Dwyer

Oak Tire & Rubber Co. F.D. Law

F.E. Partridge Rubber Co. F.E. Partridge

Sterling Rubber Co. F.L. Freudeman

Thornton Rubber Co. J. Thornton

Van der Linde Rubber Co. V. van der Linde

Lors de cette assemblée, les membres élisent les administrateurs suivants :

Président du conseil C.H. Carlisle

Vice-président J. Thornton

Secrétaire V. van der Linde

Trésorier C.N. Candee

Le conseil d’administration résout également d’engager son premier directeur général et secrétaire, A.B. Hannay, pour un salaire annuel de 5 000 $, payable en versements mensuels égaux.

Les sales années 1930

Au cours des années 1930, les conditions commerciales de l’industrie canadienne se caractérisent par des coûts de main-d’oeuvre élevés et par la concurrence d’importations à faible coût provenant des États-Unis et de Hong Kong. Surnommée « les sales années trente » ou « les années de misère », cette décennie est marquée par une sécheresse dévastatrice dans les Prairies ainsi que par la dépendance du Canada aux exportations de matières brutes et de denrées agricoles.

Le Canada s’avère l’un des pays les plus touchés par la Grande Dépression et l’Association en subit les conséquences de plein fouet, à l’instar de ses membres. En 1932, le conseil d’administration est contraint d’annuler son banquet à l’occasion de l’assemblée générale annuelle. Ses revenus chutent radicalement, si bien qu’en 1939, ils ne représentent plus que 25 % de ce qu’ils étaient durant les années fastes 1927-1928.

Malgré le contexte économique plus difficile que celui des États-Unis, l’Association obtient deux gains importants pour ses membres : elle réussit, par une offensive de lobbying, à faire réduire la taxe d’accise sur le caoutchouc brut en provenance des territoires britanniques d’outremer, ce qui représente une économie de quelque 175 000 $ pour ses membres. Elle revendique également avec succès le maintien de tarifs douaniers élevés sur les produits finis importés et collabore avec le gouvernement fédéral pour améliorer la communication des données statistiques de l’industrie.

Le dirigeable de Goodyear vole au-dessus de la baie de Toronto, vers 1930. (Source photo : Archives de la Ville de Toronto, Fonds 1244, article 4552)

LES ANNÉES 1940 : L'INDUSTRIE JOUE UN RÔLE DÉTERMINANT DURANT LA GUERRE

Pendant les années de guerre, le caoutchouc devient un matériau essentiel à tous les aspects de la production manufacturière. L’Association et l’industrie du caoutchouc participent grandement à l’effort de guerre.

L’importance du caoutchouc est telle que le gouvernement entreprend de coordonner et de contrôler cette industrie. Les prix sont gelés et bon nombre de produits sont interdits afin que la production soit mobilisée entièrement par les articles de guerre. Le ministère des Services nationaux de guerre s’emploie à promouvoir la récupération du caoutchouc à grande échelle et, en 1942, le Canada impose au grand public un rationnement des pneus, limitant leur utilisation aux véhicules considérés comme essentiels.

La participation des femmes à l’effort de guerre est cruciale. Avec les hommes partis au front outremer, elles mettent massivement la main à la pâte, occupant avec brio tous les postes laissés vacants. Au Canada, le travail en usine constitue l’un des rôles clés assumés par les femmes pendant la guerre, bien qu’elles aient également largement contribué, par leur travail bénévole, au recyclage de matériaux essentiels comme le caoutchouc, le métal, le papier, la graisse, les os, les chiffons et le verre.

Bon nombre de cadres de l’industrie du caoutchouc prêtent main-forte aux efforts de guerre. Par exemple, R.A. Martin, directeur de la Dominion Rubber Company est nommé contrôleur adjoint au contrôle du caoutchouc, un secteur clé du ministère des Munitions et des Approvisionnements, poste qu’il occupera de 1940 jusqu’à la dissolution de ce ministère, en 1947.

L’Association sert de liaison entre le gouvernement et l’industrie, travaillant en étroite collaboration avec le service du contrôle du caoutchouc pour veiller à ce que chaque entreprise reçoive une allocation adéquate de caoutchouc et produise les articles nécessaires à la fois à l’effort de guerre et à la consommation intérieure. Le gouvernement met également sur pied une agence de la Couronne, la Fairmount Corporation, dont l’objectif est de coordonner les provisions de caoutchouc en un fonds commun de ressources et d’acquérir les déchets de caoutchouc. Entre-temps,le ministère des Munitions et des Approvisionnements se charge de la production des biens de caoutchouc pour la guerre, tant pour les militaires canadiens que pour les autres membres de la coalition. Tandis que les pneus pour avions, véhicules militaires et autres besoins essentiels sont produits à partir de caoutchouc de haute qualité, on utilise un mélange de déchets de caoutchouc et de caoutchouc brut pour confectionner les articles à usage intérieur.

La pénurie de caoutchouc au Canada et aux États-Unis entraîne la création de la Polymer Corporation en 1942, chargée de mettre au point du caoutchouc synthétique. En février 1944, l’entreprise se lance dans l’élaboration de caoutchouc synthétique à Sarnia, en Ontario, où elle produit 3 300 tonnes par mois de caoutchouc synthétique à base de pétrole. Grâce à cette production, la réutilisation du caoutchouc devient superflue. Toutefois, la demande pour le caoutchouc synthétique connait un tel essor que l’entreprise doit instaurer un programme d’allocation pour les fabricants canadiens, un système qui perdure jusque dans les années 1950. L’entreprise est rebaptisée Polysar en 1976. Témoignant de son importance pendant les années de guerre, l’usine de la Polymer Corporation orne les billets de 10 $ en circulation de 1971 à 1989.

En date du 12 septembre 1945, l’honorable C.D. Howe, ministre des Munitions et des Approvisionnements, écrivait une lettre à Paul C. Jones, alors président du conseil de l’Association, comme suit :

Monsieur Jones, La dernière commande de pneus militaires étant maintenant complétée, ceci met un terme à ce qui a été l’une des plus exceptionnelles contributions d’une industrie à l’effort de guerre du Canada. Toutes les entreprises de pneus y ont participé et, ensemble, elles peuvent être fières du chemin ardu qu’elles ont réussi à franchir durant les six dernières années. De la production initiale de pneus roulage à plat à la mise au point finale de caoutchouc synthétique, vous avez su relever chacun des défis, au fur et à mesure qu’ils ont surgi, avec la volonté et la détermination nécessaires à leur bonne réalisation. La production de véhicules militaires n’a jamais été interrompue par une pénurie de pneus. Les besoins essentiels domestiques ont également été comblés. Veuillez transmettre aux membres du personnel et aux travailleurs de toutes les entreprises ma profonde reconnaissance pour tout ce qui a été accompli. Sincèrement vôtre, C.D. Howe

Un ouvrier retire le pneu de caoutchouc synthétique du four de vulcanisation à l’usine Dominion Rubber. (Source photo : Harry Rowed / Office national du film)

LES ANNÉES 1950 : CIEL BLEU ET NUAGES DE PLOMB

Dans les années 1950, l’industrie canadienne du caoutchouc et l’économie évoluent en phase avec la forte croissance mondiale et les nouveaux investissements engendrés par la demande pour des voitures, des maisons et des biens de consommation. La demande réprimée dans les années 1940 se traduit maintenant par un essor de l’industrie du caoutchouc et de l’économie en général. C’est le règne de l’automobile et les opportunités semblent illimitées. Vient alors la guerre de Corée, qui suscite l’Accord sur le partage du développement industriel pour la défense intervenu entre le Canada et les États-Unis d’Amérique. Cette initiative marque la recrudescence de la production manufacturière canadienne après le déclin qui avait accompagné la transition entre le contexte mondial d’une économie de guerre et celui d’une économie de paix à la fin des années 1940. Le gouvernement profite de l’essor économique pour imposer, à son paroxysme, des surtaxes sur certains produits de consommation comme les véhicules, les pneus et les chambres à air.

Pendant cette période, les démarches de l’Association portent sur plusieurs fronts, notamment sur des efforts de lobbying auprès du gouvernement visant à réduire la taxe d’accise, à obtenir de meilleurs tarifs de transport des compagnies ferroviaires et maritimes et à enrayer le dumping des producteurs au rabais de la Tchécoslovaquie, de la Norvège et de l’Allemagne. Dans son rapport aux membres (vers 1954), G.B. Smith note :

« De l’aide et des efforts considérables ont été déployés auprès de l’entreprise Cabot Carbon of Canada Ltd. pour établir des tarifs de fret pour le transport du noir de carbone de Sarnia, en Ontario, à des points d'approvisionnement au Québec et en Ontario. »

L’Association s’attaque également aux coûts excessifs de fret maritime pour les chaussures vendues aux Antilles britanniques. Le gouvernement défend cet enjeu auprès de Steamships Companies et la question se règle à la satisfaction de l’industrie.

En réponse à la taxe d’accise de 15 % imposée sur les pneus et chambres à air, le directeur général de l’Association, G.B. Smith, écrit :
« C’est une absurdité économique que de taxer des produits utilisés principalement dans des activités productives bénéfiques au même titre que des jukebox ou autres objets de ce genre. »

Malgré cela, à partir de la fin des années 1940, le ciel s’assombrit. Après une série d’audiences qui ont lieu d’octobre 1948 à décembre 1949, l’Associationet bon nombre de ses membres sont accusés par le gouvernement de fixation des prix en vertu de la Loi relative aux enquêtes sur les coalitions. Cette accusation découle sans doute d’une pratique légitimement établie pendant les années de guerre. En effet, à partir du milieu des années 1930, le gouvernement imposait un contrôle des prix sur plusieurs produits, dont ceux de caoutchouc. À cette époque, les fabricants de caoutchouc étaient mandatés pour maintenir les prix fixes afin d’éviter de tirer profit de la guerre. Lorsque le gouvernement jugeait que l’industrie méritait d’augmenter ses prix, les directeurs commerciaux des compagnies membres se réunissaient à l’Association pour s’entendre sur l’augmentation et la date d’entrée en vigueur. L’Association était chargée de distribuer ensuite une lettre ouverte à tous ses membres pour confirmer les prix majorés. Peut-être est-ce par habitude que cette façon de faire a perduré après la guerre, même après l’abolition des contrôles de prix.

Lors de la réunion du conseil de décembre 1953, l’Association décide de plaider coupable à l’accusation afin de réduire au maximum les coûts et les dommages à la réputation de l’industrie. À l’instar de plusieurs de ses membres, l’Association paie une amende de 20 000 $.

LES ANNÉES 1960 : DE LA POLITIQUE, DE LA SÉCURITÉ ET DE L'ÉDUCATION

Cette décennie marquée par l’adoption d’un nouveau drapeau canadien en 1965 et par les Célébrations du Centenaire du Canada en 1967 met le Canada sur la mappemonde. Tant sur le plan de la culture que celui de l’économie, le pays se définit et se démarque, notamment sur le plan technologique. Parmi les innovations canadiennes attribuées à cette période, citons l’horloge atomique, le cinéma IMAX et le bras canadien.

Les taxes et les tarifs douaniers constituent toujours un volet clé du mandat de l’Association, mais d’autres enjeux se profilent à l’horizon, notamment la normalisation et la sécurité des pneus. Comme il n’existait jusque là aucune norme de qualité pour les pneus de tourisme, l’Association canadienne de normalisation demande à l’industrie du caoutchouc de se pencher sur la question. La RMA ayant établi ses propres normes minimales pour les États-Unis en 1964, l’Association entreprend de mettre en place des lignes directrices semblables pour le Canada. Le ministère des Transports de l’Ontario adopte officiellement les normes V-1 Standards et élabore une réglementation pour leur mise en oeuvre en 1967. L’Association canadienne de normalisation adopte par la suite les normes américaines U.S. Federal Standards, qui seront entérinées par quatre provinces.

D’autres enjeux prennent également de l’importance pendant cette période, à savoir une politique publique, la sécurité au volant et l’éducation. L’Association travaille avec le Conseil canadien de la sécurité routière pour promouvoir la sécurité sur les grands axes routiers, produisant et distribuant des clips vidéo sur la conduite sécuritaire estivale et hivernale et elle commandite également l’Association des scouts du Canada à l’occasion de l’Expo 67 à Montréal.

Au cours de cette décennie, l’Association entreprend aussi des travaux exhaustifs sur les questions de taxes et de tarifs douaniers, portant majoritairement sur le Pacte de l’auto, un traité commercial conclu entre les États-Unis et le Canada en 1965 qui a mené à l’intégration des industries automobiles canadienne et américaine au sein d’un seul marché nord-américain. Les mesures de protection entérinées dans le cadre du Pacte de l’auto favorisent en parallèle l’essor de l’industrie manufacturière du caoutchouc, qui doit répondre à une demande croissante pour des pneus, des chambres à air et des composantes automobiles en caoutchouc.

La communication des statistiques et les rapports de l’industrie demeurent alors les principaux avantages d’une adhésion à l’Association et touchent tous les segments clés du marché (pneus, chaussures, etc.). Les rapports de réunions et les échéances de livraisons constituent toujours une grande source de préoccupation pour les membres de l’Association, à tel point que certains présidents d’entreprises membres n’hésitent pas à intervenir si des problématiques ou des délais surviennent.

LES ANNÉES 1970 : TARIFS DOUANIERS, COMMERCE ET NORMES

À son 50e anniversaire, en 1970, l’Association jouit d’une excellente renommée. Elle continue à cultiver ses liens avec l’industrie et à bâtir sa marque, travaillant en étroite collaboration avec le Conseil canadien de la sécurité (CCS) et le Conseil canadien des administrateurs en transport motorisé (CCATM). L’Association commence également à rayonner à l’échelle internationale en collaborant avec l’Organisation internationale de normalisation (ISO). Encore aujourd’hui, l’Association travaille avec toutes ces organisations.

L’industrie et le gouvernement continuent à élaborer les normes canadiennes en matière de qualité des pneus, un enjeu qui occupe une place de plus en plus importante dans l’industrie durant ces années 1970, tant du point de vue manufacturier que de la sécurité routière. L’un des principaux objectifs de l’Association est d’établir des normes qui s’étendent à la grandeur de la fédération, pas seulement pour certaines provinces. L’Association oeuvre de concert avec la CCATM pour déterminer des normes qui répondent aux besoins de la population canadienne tandis que la RMA crée des normes pour l’ensemble de l’Amérique du Nord.

Depuis qu’elle a représenté le Canada auprès de l’ISO lors de la séance plénière du comité technique 31 (TC31) en 1971, l’Association travaille avec cette organisation. Le comité technique des pneus de l’Association est responsable d’élaborer des normes canadiennes pour les pneus et de coordonner ses travaux avec les États-Unis et la RMA (devenue la U.S. Tire Manufacturers Association). Les deux organisations ont formé un sous-comité pour veiller à la conformité avec les normes internationales mises en oeuvre par l’ISO.

Grâce au rôle prépondérant du Canada dans la production et la mise au point de pneus d’engins de terrassement, l’Association fait aussi figure de proue comme présidente du conseil et secrétaire du sous-comité 6 (SC6, établi en 1980) chargé des normes pour les pneus d’engins de terrassement. En 1982, le Canada accueillait la première assemblée internationale de TC31/SC6 à Ottawa. Depuis, il a été pays hôte à cinq reprises pour la délégation internationale de l’industrie des pneus. L’Association continue à représenter le Canada et l’industrie lors des séances plénières internationales TC31 et SC6.

Le libre-échange et les tarifs douaniers demeurent les dossiers de premier plan traités par l’Association dans les années 1970. La production manufacturière canadienne tente toujours de faire concurrence aux marchés mondiaux, malgré des coûts de production et de distribution plus élevés ainsi que de fortes taxes. L’industrie est victime d’une affluence de pneus concurrents provenant des États-Unis et du Japon et constate que la catégorie des produits de consommation, notamment les chaussures,souffre d’importations au rabais et de dumping. Face à ces défis, l’industrie et le gouvernement reprennent le débat entre libre-échange et protectionnisme. Tandis que les entreprises de pneus considèrent la réduction des tarifs douaniers comme une entrave à l’industrie, le gouvernement n’entend pas instaurer des restrictions quant aux importations ou aux tarifs douaniers et tente plutôt de trouver des façons de rendre plus concurrentielle l’industrie du pneu et du caoutchouc grâce à une productivité manufacturière accrue.

En parallèle, le Pacte de l’auto conclu entre le Canada et les États-Unis en 1965 stimule l’essor de l’industrie automobile canadienne. La part du Canada dans la production nord-américaine passe de 7,1 % en 1965 à 11,2 % en 1971, transformant un déficit commercial en un léger surplus en 1970.

Avec une variété grandissante de types de pneus et l’avènement des pneus d’hiver sur le marché canadien, l’Association entreprend d’effectuer des essais sur les pneus d’hiver.

C’est à cette époque que Michelin inaugure une usine de production de pneus à Waterville, en Nouvelle-Écosse, construite dans des conditions très favorables grâce à une aide des gouvernements provincial et fédéral. Ce soutien engendra un certain clivage au sein de l’industrie et parmi les membres de l’Association, les autres fabricants considérant qu’une concurrence loyale est tributaire d’avantages gouvernementaux comparables.

L’usine de la Polymer Corporation (rebaptisée ensuite Polysar) a figuré sur les billets de 10 $ de 1971 à 1989 pour souligner le rôle stratégique qu’elle a joué dans l’effort de guerre. (Source photo : Banque du Canada)

LES ANNÉES 1980 : EFFONDREMENT ET RENOUVELLEMENT

Le 13 décembre 1979, le président de Goodyear Canada, A.W. Donn adresse une lettre à l’Association l’informant qu’à compter du 31 décembre 1979, Goodyear Canada Inc. et Seiberling Canada Inc. se retireraient comme membres. Une nouvelle dévastatrice pour l’organisation, à tel point que la survie même de l’Association était menacée. La contribution des deux entreprises comptait pour plus d’un tiers des sommes perçues, et sans les données de Goodyear, le programme de statistiques de pneus devenait à toutes fins pratiques inutile. Goodyear offre un secours financier à l’Association et accepte de payer ses contributions pour le premier semestre de 1980. Ceci donne le temps au conseil d’administration de trouver d’autres solutions. Pour survivre, l’Association doit mettre à pied du personnel, réduisant l'effectif au minimum. Elle nomme Doran Moore, ancien président du conseil de Firestone Canada, nouveau président de l’Association. Son mandat comporte deux principaux objectifs : convaincre Goodyear de revenir au sein de l’Association et Michelin de s’y joindre.

Pendant les années qui suivent, l’Association et M. Moore tendent la main à Goodyear et Michelin à de nombreuses reprises. En 1982, Goodyear adhère à nouveau et le conseil d’administration approuve la demande d’adhésion de Michelin Amérique du Nord (Canada) Inc. Plus tard la même année, Bridgestone et Yokohama se joignent à l’Association, puis en, 1983, Toyo Tires devient membre à son tour.

Le 8 février 1985, alors âgé de 72 ans et satisfait de ce qu’il a accompli, Moore remet les rênes de l’Association à l’ancien président de Dunlop Canada Ltd., M. Brian E. James.

Accord de libre-échange nord-américain

Dans la période menant à la signature de l’Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis, qui entre en vigueur le 1er janvier 1989 (et qui deviendra en 1994 l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA), le gouvernement fédéral du Canada et les industries se demandent si les entreprises manufacturières canadiennes sont en mesure de concurrencer les entreprises américaines sans tarifs douaniers.

Au Canada, les fabricants de pneus et de produits de caoutchouc exploitent essentiellement des usines plus petites dédiées à des produits spécifiques destinés au marché canadien. Ces petites chaînes de montage aux cycles de production plus courts engendrent des coûts d’exploitation plus élevés et de plus grandes lacunes en termes d’efficience du mode de production. Parallèlement, Industrie Canada souhaite maintenir le pourcentage d’éléments canadiens dans la production automobile; veiller à la production de pneus d’équipement d’origine « Fabriqués au Canada » pour chaque véhicule constituait une excellente façon d’atteindre cet objectif.

C’est dans cette optique qu’Industrie Canada élabore un Protocole d’entente entre le gouvernement et les membres de l’Association et participe à un programme de remise de droits de douane en vertu de la Loi sur l’administration financière. Cette loi permet aux entreprises de caoutchouc de réclamer les droits de douane payés sur les pneus importés des États-Unis en échange de nouveaux investissements effectués au Canada à raison d’un ratio de trois pour un. Autrement dit, une entreprise de pneus reçoit un dollar pour chaque tranche de trois dollars réinvestis auCanada. Cette remise des droits de douane se chiffre à quelque 250 millions de dollars, et près d’un milliard est investi par l’industrie dans de nouvelles usines de pneus et d’équipement au Canada. Bien sûr, toutes les entreprises ne réussissent pas à profiter de ce programme et, inévitablement, plusieurs installations canadiennes cessent leurs opérations, notamment celles de Firestone à Hamilton, de General Tire à Barrie et de Dunlop à Whitby.

En plus du Protocole d’entente, Brian James revendique et obtient un plan d’élimination des droits de douane sur 10 ans pour l’industrie du pneu et du caoutchouc, et ce, afin d’aider l’industrie à se préparer pour l’Accord de libre-échange. Grâce à ses démarches, les trois fabricants de pneus installés au Canada – Bridgestone, Goodyear et Michelin – exploitent des installations d’envergure mondiale qui sont aujourd’hui pleinement intégrées aux opérations manufacturières mondiales. Tel est l’héritage de Brian James et de son successeur, Don Campbell, les deux ayant guidé l’intervention du gouvernement dans ce programme d’investissement.

LES ANNÉES 1990 : CAP SURLA DURABILITÉ

Avec les incendies dévastateurs à Hagersville, en Ontario, et à Saint-Amable, au Québec, 1990 est l’année des incendies de pneus au Canada. Le brasier de Hagersville fait rage pendant 17 jours en plein février, faisant quotidiennement la manchette aux nouvelles locales et nationales, dans les journaux comme à la radio et à la télévision. Cet incendie coûte finalement dix millions de dollars à éteindre. Il devient le moment charnière qui marque la prise de conscience des gouvernements, de l’industrie et du grand public sur l’importance d’agir en matière de mise au rebut des pneus usés et la référence par excellence quand il s’agit derecyclage de pneus, de gestion des pneus hors d’usage et d’initiatives de récupération responsable des pneus.

À cette époque, l’Association est déjà dotée d’un Comité des pneus usés aidant l’industrie à trouver des solutions à cet enjeu et à travailler de pair avec les gouvernements provinciaux pour financer des initiatives en la matière. En 1989, l’Ontario institue une taxe sur les pneus en réponse à ce problème. Même si cette taxe est abolie en 1993, elle a mobilisé des entrepreneurs et des idées et suscité des investissements et la création de nouvelles technologies utiles à la gestion des pneus usés.

Dans les années qui suivent, plusieurs provinces emboîtent le pas et créent des programmes visant à résoudre le problème de gestion des pneus usés. En 1994, l’Association organise et accueille le premier Symposium semestriel du recyclage du caoutchouc, qui réunit les principales parties prenantes de l’industrie pour travailler ensemble sur cet enjeu crucial.

Aujourd’hui, chaque province est dotée d’un programme formel prescrit pour la gestion des pneus usés. L’Association est active dans trois de ces programmes : ceux de la Colombie-Britannique, du Manitoba et de l’Ontario. Par ses liens avec l’Association canadienne des agences de recyclage des pneus (l’ACARP), l’ACPC joue un rôle proactif dans tous les programmes provinciaux d’intendance des pneus au Canada.

Depuis le premier Symposium sur le recyclage du caoutchouc en 1994, l’Association véhicule l’engagement de l’industrie dans un avenir durable.

Pictogramme de la montagne aux trois sommets avec flocon de neige

Dans les années 1990, le Canada devient le point de mire de l’industrie mondiale des pneus et des décideurs en matière de politiques pour ce qui a trait au lien entre le type de pneus et la conduite sécuritaire dans des conditions hivernales. La question est scrutée à la loupe lors d’une enquête de coroner sur une collision de véhicules ayant causé la mort et impliquant directement un véhicule équipé de pneus inadéquats pour les conditions routières hivernales. L’industrie du pneu et les décideurs reconnaissent alors la nécessité de classer les pneus conçus pour la conduite hivernale.

L’Association prend le flambeau pour la création de normes mondiales s’appuyant sur la méthode du test de performance des pneus d’hiver ASTM F-1805 mené sur une base volontaire. Pour distinguer les pneus qui répondent aux normes des autres pneus, l’Association crée aussi le symbole de la montagne aux trois sommets avec flocon de neige. Depuis 1999, ce test et ce symbole représentent partout dans le monde les pneus expressément conçus pour la conduite hivernale.

LE RÔLE DE L'ASSOCIATION DANSLA GESTION DES PNEUS USÉS

La saga de l’intendance des pneus en Ontario dépasse largement ce qui est relaté dans la présente rétrospective commémorative. Une chose est claire cependant : l’Association, de concert avec d’autres parties prenantes comme les associations de détaillants et de marchands indépendants, a investi des milliers d’heures pour créer un modèle de gestion et de financement fonctionnel pour les Ontariens et l’industrie.

La Société des pneus usagés de l’Ontario (SPUO) est créée en vertu d’une entente entérinée par trois membres fondateurs, la Rubber Association of Canada, le Conseil canadien du commerce au détail et l’Ontario Tire Dealers Association. Le 10 septembre 2002, elle reçoit ses lettres patentes énonçant, pour principal objectif, « d’agir comme organisme de financement industriel pour le programme de réacheminement des déchets de l’Ontario. » Bien que l’organisme ait été constitué pour assumer l’entière responsabilité de la gestion des pneus usés en Ontario et est bien disposé à le faire, il faudra six autres années avant que le gouvernement adopte un règlement permettant à l’organisme d’amorcer formellement ses activités en septembre 2009.

Au cours de la première décennie, la SPUO contribue de façon considérable à l’évolution de la gestion des pneus usés dans la province, y compris en attirant des fonds additionnels de plus de 70 millions de dollars en investissements dans des installations de traitement en Ontario; de quelque 6 millions en recherche et développement; et de 20 millions en campagnes de sensibilisation grand public. De plus, grâce à son monopole, la SPUO parvient à réduire les frais d’intendance des pneus de plus de 40 % dans sa première décennie d’existence.

Le succès n’étant pas gage de pérennité, la SPUO, ainsi que d’autres organismes de financement industriels en Ontario, sont sacrifiés lorsque la province adopte en novembre 2016 la Loi favorisant un Ontario sans déchets. Tandis qu’on procède à l’abolition de la SPUO, les producteurs de pneus et d’autres matériaux générant des flux de déchets sont réglementés de façon à ce que chaque fabricant soit individuellement tenu responsable des produits qu’il met sur le marché.

C’est ainsi qu’en février 2017, l’Association crée eTracks Tire Management Systems, un organisme sans but lucratif à charte fédérale chargé d’aider les entreprises de pneus membres à se conformer à la nouvelle réglementation. La Société des pneus usagés de l’Ontario achève sa dissolution formelle le 31 décembre 2018 tandis que l’organisme eTracks entreprend en janvier 2019 d’aider les membres de l’Association à honorer leurs obligations liées aux pneus usés. Bien qu’elle n’ait guère plus qu’un an d’existence, eTracks réussit à remplir son mandat, à faire preuve de leadership dans l’industrie et à faire valoir l’engagement des membres de l’Association envers l’intendance des pneus – aujourd’hui et demain.

LES ANNÉES 2000:

En 2001, la Loi 90 a passé sa première lecture au gouvernement de l’Ontario, un processus qui a suscité la création du Programme de réacheminement des déchets de l’Ontario, qui à son tour a mené à la fondation des Organisations de financement industriel (Industry Funding Organizations) pour les pneus, les appareils électroniques, la peinture, les boîtes bleues de recyclage, etc. Nous sommes nombreux à travailler d’arrache-pied à cette époque pour former l’Ontario Tire Stewardship (OTS), société incorporée en 2003. Ce n’est que six ans plus tard, en septembre 2009, que l’OTS obtient sa reconnaissance officielle lui permettant d’exécuter la mission qui lui avait été attribuée.

l’ACPC mentionnons que la collaboration avec Transports Canada nous a permis de mieux comprendre les dispositions réglementaires de la National Highway Traffic Safety Administration (NHTSA) en vertu de la nouvelle loi, le TREAD Act, qui allait monopoliser l’industrie des pneus pendant plusieurs années par la suite.

C’est également à cette époque que l’ACPC élabore le Health & Safety Guidebook, un guide de santé et de sécurité publié en juin 2002 qui allait devenir le manuel pédagogique de référence pour le programme Groupes de sécurité (Safety Group Program), qui est financé par la Commission des accidents du travail (Workers Compensation Board) et qui a versé des centaines de milliers de dollars à ses membres sous forme de rabais.

Vers la fin de la décennie, les effets de la Grande Récession se font sentir. Des membres de premier plan comme Gates et Dayco mettent fin à leurs activités au Canada, privant l’ACPC de précieux membres alliés et bénévoles. Une campagne exhaustive d’adhésion élaborée à la fin de cette décennie porte enfin ses fruits, qui subsisteront dans les années ultérieures.

Quatre présidents de l’Association : (de gauche à droite) Don Campbell (1997-2001),Doran Moore (1980-1985), Glenn Maidment (2001-2020) et Brian James (1985-1997).

LES ANNÉES 2010:

La dernière décennie du premier centenaire de l’ACPC est caractérisée par l’éveil de l’industrie à la nécessité de l’intendance environnementale. Chaque membre s’approprie la responsabilité sociale d’entreprise d’assainir la planète pour laisser aux enfants de nos enfants un environnement meilleur. En fait, le développement durable, une notion possiblement galvaudée dans certains secteurs, était pour le segment du caoutchouc un réel et important élément moteur guidant ses efforts en recherche et en développement. Les grands fabricants de pneus se mettent à investir dans d’importants transformateurs de pneus usés et dans l’utilisation de matériaux de caoutchouc recyclé pour la production de pneus neufs. L’accent est mis sur la substitution à la pétrochimie de matériaux biosourcés renouvelables ainsi que sur des investissements visant au remplacement et à la pérennité du caoutchouc naturel. Pour l’ACPC, cet axe d’intérêt des membres vient justifier plus que jamais ses investissements depuis 1994 dans le Symposium sur le recyclage du caoutchouc, un événement qui revêt aujourd’hui encore plus d’importance pour véhiculer l’engagement de l’industrie dans un avenir durable.

Le travail de l’ACPC auprès des programmes provinciaux d’intendance des pneus en Ontario, au Manitoba et en Colombie-Britannique a servi de tremplin au rôle clé que joue l’ACPC aujourd’hui dans l’Association canadienne des agences de recyclage des pneus (l’ACARP) et dans l’orientation des démarches du Canada visant à favoriser une intendance responsable des pneus. Les chiffres sont éloquents : le succès du Canada dans la gestion des pneus usés (atteignant quasiment un taux de diversion de 100 % selon les données de l’ACARP) est inégalé dans le monde, et l’ACPC et ses membres peuvent légitimement s’arroger une part du mérite.

Assemblée de l’Association canadienne des agences de recyclage des pneus (ACARP), 2016.

L'Association canadienne du pneu et du caoutchouc

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